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Le Maroc s’honore par un passé dépassant largement les 12 siècles et remontant jusqu’au berceau de l’humanité

Par: Rachid RAHA, Président de l’Assemblée Mondiale Amazighe

Dans l’entretien accordé par «LE MATIN» à M. Youssef Amrani, actuel ambassadeur marocain en Afrique du Sud, le 3 février dernier, celui-ci affirme que la «diplomatie marocaine honore pleinement le passé de 12 siècles d’histoire». Malheureusement, il s’aligne sur les mêmes arguments que la délégation marocaine, sous la conduite de général Houssni Benslimane, avait exposé face à la délégation d’Afrique du sud, conduite par feu Nelson Mandela, pour le Mondial de Foot de 2010 et que la FIFA s’est inclinée en faveur de ce dernier pays, à l’extrême sud de notre continent africain!

M. Amrani ajoute qu’: « il y a des perversions de l’histoire qui usurpent les faits pour tromper les jugements. C’est là qu’un effort de pédagogie s’impose pour notre diplomatie à travers le monde ». Effectivement, et c’est dans ce cadre de pédagogie historique que j’essaie de lui répondre et de lui affirmer que l’histoire du Maroc s’honore de plus de 12 siècle de dynasties musulmanes, en survolant les quatre siècles de présence romano-phénicienne, les royaumes maures et rétrocédant jusqu’à la préhistoire, en remontant jusqu’à « l’Homme d’Adrar ighoud », qui constitue pour le moment l’aïeul de l’humanité, depuis plus de 300 000 ans !

En effet, nous devons être merveilleusement fiers de notre histoire plurimillénaire qui dépasse même les 33 siècles qu’avait résumé notre éminent amazighologue Mohamed Chafik et que l’historienne Halima Ghazi-Ben Maïssa résume bien en ces termes : « Tout le monde sait que le pays de Tamazgha (Afrique septentrionale ou Berbérie) avait connu une occupation fabuleuse de sa terre depuis l’Australopithèque jusqu’à l’homme historique en passant par l’Homo Erectus, l’Homo sapiens d’Ighoud, l’homo sapiens sapiens (auteur de la culture atérienne), le Mechti Afalou (auteur de la culture mouilahienne nommée à tort d’Ibéro-maurusienne) et le Capsien. Toutes les cultures y sont représentées, avec une grande densité et bizarrement de l’Océan à la vallée, uniquement, occidentale, du Nil. Influencés par les textes religieux et fascinés par les civilisations des oasis fluviales et des points d’eau du Moyen Orient, d’aucuns ont voulu faire de cette partie du monde le berceau de l’humanité. Or, l’archéologie démontre tout à fait le contraire. Comparé à la richesse de l’Afrique du Nord et du Sahara en sites préhistoriques, le Moyen Orient, où ne rencontre que de misérables sites dont les plus anciens ne remontent pas plus à la fin de Neandertal qui, par ailleurs, a connu une extinction, fait piètre figure » (le monde amazigh n°66, septembre 2005).

Votre incompréhensible manie de réduire l’histoire du Maroc à l’époque islamique, et plus concrètement à l’apparition de la dynastie Idrisside, est un reflet de manque totale de respect à la mémoire collective préislamique et où la royauté n’est plus de tout apparue à partir de l’exil de Moulay Idriss Premier, un chiite persécuté au Moyen Orient, et qui a trouvé refuge chez la généreuse tribu des Awrabas de Volubilis romaine. Nos politiciens et nos intellectuels, qui s’entêtent à s’enfermer dans une histoire officielle (qui commence à peine d’être révisée au sein des nouveaux manuels scolaires) à réduire notre passé juste à douze siècles, à la fondation de la dynastie des Idrissides, nous font beaucoup de tort et portent de profonds préjudices à nos aïeuls! Lisez ce que véhicule un de ces prétendants historiens que je ne veux plus nommer: «l’histoire du Maroc débuta avec l’islamisation…Le fondateur de la Nation marocaine, Idriss I-ier, constitua un Etat indépendant des deux grands pôles du monde musulman qu’étaient alors Bagdad et Cordoue». Mais ce qui est un fait historique, c’est qu’Idriss Premier eut un règne éphémère autour de Volubilis, lorsqu’il épousa la fille de chef des tribus amazighes Awraba, Kenza. Le règne des Idrissides a connu plutôt sa splendeur et sa croissance sous le règne d’Idriss II, (à l’époque des deux autres dynasties musulmanes : les Banu Salah au Rif et les Berghouatas à Tamesna). N’oublions pas que ce dernier n’avait pris le pouvoir qu’à l’âge de onze ans. En réalité, la personne qui détenait vraiment les arcanes du pouvoir était bel et bien sa mère, Kenza, et c’est elle, et grâce à son intelligence, à sa ruse et à ses capacités de négociation, elle a réussi véritablement à unir les tribus amazighes autour de Fès. C’était une femme amazighe, qui en se fondant sur la légitimité patriarcale des hommes et en manipulant son fils, qu’elle gérait les affaires politiques, administratives et militaires de ce nouvel état musulman. Et lorsque son fils mourut, en 828 ou 829, c’est toujours elle qui a postulé le partage du règne entre ses dix petits-fils, et par conséquent, elle l’a affaibli par les tiraillements de ces nombreux successeurs, jusqu’au 920 où la capitale de Fès tomba aux mains des tribus amazighes des Miknasa et Kétama. En fin de compte, si la dynastie idrisside a eu un rôle religieux déterminant dans la conversion à l’Islam de nombreuses tribus amazighes païennes ainsi que la diffusion de la tradition chérifienne, cela revient au courage d’une femme amazighe érudite : Kenza Awrabiya.

Il est de notoriété que M. Amrani et la majorité de nos politiciens, issus des milieux conservateurs, imprégnés d’une idéologie importée et dépassée de « nationalisme arabe et de salafisme religieux», n’est pas encore conscient de la reconnaissance constitutionnelle de l’identité amazighe dans la Constitution du premier juillet 2011 ! Ils ne sont pas au courant que la royauté au Maroc, ne surgit pas qu’avec l’Islam, sinon remonte bien au-delà, au moins aux royaumes maures où le grand historien espagnol Enrique Gozalbes-Cravioto résume en ces termes, dans son article sur les origines de la monarchie au Maroc antique : « Esta es sin duda la gran novedad del Marruecos antiguo, en el marco paralelo del Norte de Africa en la antigüedad : la existencia tan relativamente antigua de unas grandes monarquias territoriales, y no solo poderes locales con relativa fuerza »… Eh ben oui, l’école marocaine passe sous silence les exploits des rois Baga, Yugurtha, Bochus I, Masinissa, Juba I et Juba II et Ptolémée... à l’époque romaine ! Ce dernier « aguellid » maure, par exemple, Ptolémée, ils ignorent qu’il a été dramatiquement assassiné par l’empereur romain Caligula à la ville romaine de Lyon française de Logdunum, en l’an 40 ap. J.-C., simplement parce que notre roi marocain était habillé élégamment !

Ce que j’aimerais humblement conseiller à notre ambassadeur et à tous nos diplomates nordafricains, c’est ce que j’avais déjà écrit aux ministres des affaires étrangères de nos pays d’Afrique du Nord, en mai 2019 : « En paraphrasant l’écrivain Tahar Ben Jelloun, la richesse de Tamazgha ce ne sont ni les hydrocarbures, ni les phosphates, ni le tourisme, ni la pêche, ni l’agriculture, mais son capital humain, ses hommes et ses femmes, mobilisés contre la pandémie du coronavirus, contre la famine et contre le sous-développement. Aujourd’hui plus que jamais est un moment historique pour nous tous de réfléchir et agir responsablement et positivement pour les relations Sud-Sud, où tout le monde gagne, pour une politique régionale de développement et pour la reconstruction de l’Union des Etats d’Afrique du Nord, sur de nouvelles bases, plus réalistes et plus pragmatiques, et qui se substituerait à la moribonde et impuissante Union du Maghreb « Arabe » (UMA) ». Cette nouvelle union devrait se baser plus sur une vision africaniste amazighe et moins sur des considérations idéologiques arabo-islamistes obsolètes que feu l’islamologue Mohamed Arkoun n’arrêtait pas de dénoncer. Une nouvelle union régionale, à l’exemple de l’Union Européenne, qui se base sur l’histoire millénaire de ce continent qui puise ses origines dans la civilisation amazighe. Une union qui se reconstruit en accord total avec la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, et qui respecterait la déclaration des Nations Unies des droits des peuples autochtones du 13 septembre 2007. Une union qui érigerait comme priorités les droits des femmes, la lutte contre toute forme de discrimination à leur encontre, le respect de la diversité ethnico-linguistique, la pluralité des croyances religieuses et le multipartisme. En définitive, une union qui se basait sur des valeurs et les principes démocratiques. Si les européens se vantent de l’origine de la démocratie qui remonterait à la création de la ville grecque d’Athènes, vers 800 ans avant. J-C., nous, en tant qu’Africains, nous devons être aussi fiers de nos aïeuls qui ont eu le privilège d’être les pionniers dans l’invention de la « démocratie » dans la cité de Carthage, sous la reine Elisa Didon en 814 avant J-C.» (https://amadalamazigh.press.ma/fr/raha-demande-la-reconstruction-de-lunion-dafrique-du-nord-et-le-denouement-du-drame-libyen/ )..

Ainsi, pour convaincre les autorités sudafricaines, et par extension les autorités des autres pays africains (et inclus celles de l’Amérique latine), de l’intégrité territoriale du Maroc sur son Sahara (largement amputé par la France coloniale au bénéfice de l’Algérie), il n’y a pas de plus opportun que d’ériger le discours renouvelé du panafricanisme, comme l’affirme lui-même Monsieur Amrani en ces termes : « Le projet africain a toujours été porté, chéri et honoré au plus haut niveau par Feu Mohammed V, Feu Hassan II et Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Nous célébrons aujourd’hui le 60e anniversaire de la conférence de Casablanca. 60 années durant lesquelles le Maroc n’a jamais failli à faire de son continent d’appartenance une priorité, un engagement et une ambition. Sous le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, c’est d’abord et avant tout des engagements sans faille et des solidarités sans égales qui préfigurent la politique africaine du Royaume. Le Maroc honore son identité et assume ses devoirs en apportant sa contribution forte et largement appréciée à l’édifice d’une prospérité continentale partagée qui ne peut être conçue en dehors du développement, de la paix et de la sécurité. Pleinement conscient de l’urgence des enjeux d’aujourd’hui comme ceux de demain, le Maroc n’économise aucun effort pour participer à «une synergie africaine» qui pousse inlassablement vers le progrès dans le cadre d’une coopération Sud-Sud voulue et façonnée par un panafricanisme à l’élan renouvelé. ».

En effet, si nous voulons vraiment contrecarrer les arguments des généraux algériens, qui maintiennent des liens remarquables avec l’Afrique du Sud (et d’autres pays), et qui l’embarque erronément dans leur obsession destructrice de pérenniser la guerre militaire et économique au royaume Maroc, en vilipendant l’argent des ressources naturelles du peuple algérien, , il faut ressortir les fondements de l’africanité ou négritude que défendait Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor et les fondements de la berbéritude que défendait notre grand défenseur de l’amazighité Mouloud Mammeri en Afrique septentrionale!

Et l’un des meilleurs arguments et fondements sont d’ordre archéologiques et historiques, surtout que l’Afrique du Sud privilégie énormément les recherches dans ce domaine. De ce fait, il faut convaincre les Sud-africains que leurs populations autochtones, comme les Nord-africains (dont les populations sahariennes, algériennes et marocaines), descendent tous de l’Australopithèque et de l’Homme d’Ighoud, et que notre continent constitue le berceau de l’humanité ! Dans ce sens, c’est inconcevable de permettre l’existence d’une fictive entité républicaine « Arabe » en terre autochtone amazighe et africaine ! Reconnaître une soi-disant république sahraoui « Arabe » en Terre de Massinissa, c’est comme si on reconnaît une république des « afrikaners allemands et hollandais» en terre d’Afrique australe (ou une « république espagnole » en Bolivie ou au Venezuela), tout en sachant parfaitement que « l’arabité » est intimement liée au continent asiatique !

Si l’Algérie s’enlise dans le statu quo en continuant à armer le Polisario et en rejetant tout plan d’autonomie politique, comme celui que le Maroc avait soumis à l’ONU en avril 2007, (un statut réaliste et plus bénéfique que l’indépendance comme le souligne notre juriste Dr. Mimoun Charqi : https://charqi.blog4ever.com/articles/9-sahara-occidental-marocain) en continuant à brandir inlassablement l’argument déplacé de l’autodétermination des peuples, il faut ressortir l’argument de l’africanité et la genèse des premiers mouvements de libération contre les puissances coloniales européennes, qui ont divisé avec des règles et des armes notre chère continent, qui porte toujours un ethnonyme amazighe qu’est l’Afrique!

Si les généraux algériens, qui ont confisqué illégalement et illégitimement le pouvoir en Algérie, continuent maladivement à bloquer l’émergence et la reconstruction de l’Union de l’Afrique du Nord, sur de nouvelles bases, armons-vous de courage pour mettre en relief la figure emblématique et exemplaire des premiers mouvements de libération en Afrique et dans le monde. Une figure par excellence marocaine, nous pensons bien sûr à notre grand héros Mohamed Abdelkrim El Khattabi, qui a écrasé depuis exactement une centaine d’année la grande armée coloniale espagnole à la bataille d’Anoual et dont sa singulière révolution avait séduit Ho Chi Minh, Mao Tsé Toung et les révolutionnaires algériens (http://rachidraha.com/Abdelkarim.html). Osons-nous de le répéter à nos frères sudafricains que le propre FLN algérien avait, bel et bien, trouvé refuge et soutien militaro-financier au royaume du Maroc, et plus particulièrement dans notre province de Nador, de la part de nos citoyens et plus particulièrement de la part de l’un de mes proches, Mohamed Khader El Hamouti (www.amadalamazigh.press.ma/archivesPDF/100.pdf et www.yabiladi.com/investir/details/102764/mohamed-khadir-marocain-fournissait-armes.html ).

Rappelons-les que le président Nelson Mandela, notre célèbre héros mondial anti-apartheid, témoignait et confessait qu’il avait reçu de l’aide financière conséquente de la part de roi du Maroc et que, lui-même, s’est entrainé au maniement des armes à Segangan dans notre province de Nador. En plus, il a le mérite de le reconnaître et de rendre un vibrant hommage au Maroc et au Dr. Abdelkrim el Khatib de son vivant, et écoutons-le attentivement ce qu’il disait : www.youtube.com/watch?v=iSsw75dgwUc

En conclusion, je termine par cette éternelle et fameuse déclaration du roi amazighe Massinissa : « l’Afrique aux africains » !

Nota: en photo feu Sa Majesté Mohamed V avec Med Abdelkrim El Khattabi au Caire